Comprendre l’augmentation du prix de l’électricité
Alors comment expliquer cette augmentation du prix de l’électricité ? Dans cet article, on vous aide à comprendre les dessous de cette hausse qui nous impacte tou.tes.
- Marché de l’électricité : les rappels de base
- D’où vient la hausse du prix de l’électricité ?
- Prix de l’électricité : quelles répercussions sur les consommateurs ?
- Les conséquences sur le développement des énergies renouvelables
Marché de l’électricité : les rappels de base
Le marché français et le tarif réglementé de vente
Comment fonctionne le marché de l’électricité en France à l’heure actuelle ? Depuis 2007, le marché français est ouvert à la concurrence. A ce moment-là, le fournisseur historique – EDF – a vu l’arrivée de nouveaux fournisseurs, dits « alternatifs », avec des offres de marché. Auparavant, pour tout le monde, le prix de l’électricité était fixé par l’Etat selon le tarif réglementé de vente (= TRV). Actuellement une offre au TRV est exclusivement proposée par EDF, qui en a l’obligation.
👉 Comment le TRV est-il fixé ? C’est la Commission de Régulation de l’Énergie (= la CRE) qui calcule le TRV. Il le soumet ensuite à l’État, qui lui-même donne son feu vert final.
Aujourd’hui encore, la majorité des offres électriques destinés aux ménages français sont indexées sur le TRV. A noter que les fournisseurs alternatifs sont tout de même libres en termes de fixation de leurs prix.
Prix de l’électricité : comment se compose-t-il ?
Côté facture chez le consommateur final (vous), le prix de l’électricité se divise en trois grands postes :
- la production de l’électricité : le marché de l’électricité détermine pour chaque demi-heure, la valeur de la production d’électricité permettant d’équilibrer le réseau.
- l’accès au réseau électrique : ce coût intègre le Tarif d’Utilisation du Réseau Public de l’Électricité (= Turpe), fixé par la CRE, pour couvrir les coûts d’entretien et de développement des réseaux de transport et de distribution de l’électricité (gérés par RTE, Enedis et les entreprises locales de distribution) ;
- les taxes : qui comprennent ici la Taxe Intérieure sur la Consommation Finale d’Electricité (TICFE) qui a intégré ce qui était historiquement la CSPE utilisée pour financer le développement des énergies renouvelables, les Taxes sur la Consommation Finale d’Électricité (= TCFE et TDCFE), la Contribution Tarifaire d’Acheminement (CTA) et enfin, la TVA.
Et d’où vient la hausse du prix de l’électricité ?
La production marginale d’électricité, le prix du gaz, le prix du CO2
La première explication, purement liée au fonctionnement de notre réseau électrique, est le coût marginal des centrales les plus chères en fonctionnement qui détermine le prix de marché de l’électricité.
On s’explique. En cas d’augmentation de la demande d’électricité, ce qui est le cas en hiver, il est nécessaire pour le réseau de couvrir ces pics de consommation. Pour assurer l’équilibre entre l’offre et la demande, nous faisons appel à des centrales électriques en renfort. Ces centrales sont bien souvent des centrales fossiles et notamment à gaz, car elles sont facilement pilotables. Bien entendu, ces centrales ont un coût marginal très élevé si le prix des combustibles (gaz, pétrole) est cher. Le prix du gaz ayant considérablement augmenté, il s’est ainsi directement répercuté sur le marché de l’électricité.
Dépendance énergétique et enjeux géopolitiques
Ok, mais dans ce cas allons plus loin : comment expliquer l’envolée du prix du gaz ?
Depuis le deuxième semestre 2021, la reprise économique mondiale a fait grimper le prix directeur de l’énergie, notamment des énergies fossiles.
Par ailleurs, le gaz naturel est plus que jamais un enjeu géopolitique majeur entre l’Union Européenne et son principal fournisseur : la Russie (pays qui, rappelons-le, représente pour nous 40% des importations en gaz). Or, dans un contexte de crise ukrainienne, le pays a entamé une stratégie de rétention et refuse de faire transiter davantage de gaz via l’Ukraine, notamment en suspendant la mise en service du tout nouveau Gazoduc Nord Stream 2, inauguré en septembre dernier.
Ajoutez à cela des stocks de gaz particulièrement faibles suite à l’hiver 2020 – 2021, et vous avez des prix qui flambent.
Où en est-on avec le coût des émissions de CO2 ?
Depuis 2005, l’Union Européenne a mis en place un marché du carbone pour mesurer, contrôler et réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’industrie de la production d’électricité. Les producteurs sont dans l’obligation d’acheter des permis d’émission de CO2 – aussi appelés des quotas – qui correspondent à leurs émissions.
Or, avec le renforcement des objectifs européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, le prix de ces quotas a considérablement grimpé : il a été multiplié par 4 depuis le mois de mars 2020. Des facteurs qui impactent directement le coût de production des centrales fossiles (dont les centrales à gaz), qui émettent énormément de CO2 à la production.
👉 Résultat : plus le prix du CO2 est élevé, plus le fait de produire de l’électricité à partir d’énergies fossile est cher.
Prix de l’électricité : quelles répercussions sur les consommateurs ?
Revenons-en aux conséquences sur le consommateur final.
Compte tenu du contexte expliqué au-dessus, le 19 janvier dernier, la CRE recommandait à l’État de procéder à une augmentation des TRV électriques. Une augmentation moyenne de +44,7% hors taxes, soit +35% TTC pour le consommateur, qui n’a pas eu lieu et s’est finalement chiffrée à +4% le 1er février dernier.
Comment l’État a-t-il réussi à contenir cette augmentation ?
Finalement, le raisonnement du gouvernement français a été plutôt simple. Rappelez-vous des 3 postes qui composent votre facture : si le prix de l’électricité augmente, que les fournisseurs doivent bien survivre, il ne reste qu’un seul levier actionnable… Celui des taxes.
L’État a d’abord décidé d’agir sur la TICFE (Taxe Intérieure sur la Consommation d’Électricité), en l’abaissant de 22,50€ à 1€ (le minimum légal). Un effort fiscal de 8 milliards d’euros supporté par l’État donc, et permettant de compenser une partie de la hausse du prix du marché de l’électricité.
Dans un second temps le gouvernement a imposé à EDF de vendre davantage d’électricité aux fournisseurs alternatifs et ce, à des prix bien inférieurs que ceux pratiqués sur le marché (46€ le MWh contre 200 à 600€ le MWh sur le marché). Dans le cadre du dispositif de l’ARENH, ce sont donc 120 TWh qui seront mis à disposition des fournisseurs, au lieu de 100 TWh en temps normal. A noter que les fournisseurs sont tenus de répercuter automatiquement et intégralement les bénéfices perçus sur le consommateur final. Une mesure qui coûtera ainsi entre 7,7 et 8,4 milliards d’euros à EDF.
Les conséquences sur le développement des énergies renouvelables
Quelles sont les répercussions sur le financement des énergies renouvelables en France ?
En France, les énergies renouvelables (EnR) sont en grande partie financées grâce aux subventions, elles-mêmes issues des taxes assumées par les contribuables français. En 2019, 5,135 Mds € ont été débloqués grâce à la TICFE/CSPE pour soutenir la production renouvelable [1]. Une taxe importante donc, qui se trouve donc aujourd’hui réduite à son strict minimum.
On peut deviner sans peine que les montants qui seront attribués au développement des énergies renouvelables seront largement revus à la baisse en 2022. Ce qui, vous l’aurez compris, est un très mauvais signal envoyé à l’industrie du renouvelable. Notons enfin qu’en continuant sur cette lancée, il sera très compliquer d’atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur lesquels nous nous sommes engagés d’ici 2030.
Un système de financement du renouvelable à revoir ?
L’une des choses que l’on peut retenir de cette crise d’énergie – au-delà de notre dépendance vis à vis des puissances énergétiques mondiales – c’est la limite évidente de notre politique de soutien des EnR en France. Pourquoi ? L’écologie punitive que représentent les taxes et la subvention sont des mécanismes de financement qui varient continuellement en fonction des décisions et élections politiques. Le développement des énergies renouvelables nécessite quant à lui un financement stable et pérenne sur le long terme.
👉 La question est donc posée : doit-on continuer à financer les EnR par les taxes et les subventions ? Ou bien doit-on soutenir des mécanismes de marché volontaire qui ont déjà fait leurs preuves chez certains voisins européens ?
Nous y répondons dans l’une de nos dernières réactions : Mécanismes de marché versus taxes et subventions, que choisir ?
Sources :
Le Monde ; « Comprendre d’où vient la hausse de l’électricité et pourquoi elle aurait dû être bien plus élevée »
Connaissance des énergies ; « Vers une envolée des prix du gaz et de l’électricité »
[1] CRE ; « Financement du soutien aux EnR »
Photo by Jonathan Daniels ; Ria Puskas ; Mārtiņš Zemlickis
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